Italo Calvino (1923-1985)

Leçons Américaines


  • La leçon que l'on peut tirer d'un mythe se trouve dans la littéralité du récit, non dans les ajouts que nous imposons de l'extérieur. (21)

  • Comme disait Paul Valéry: « Il faut être léger comme l'oiseau, et non comme la plume.» (38)

  • Tout comme la mélancolie est la tristesse devenue légère, l'humour est le comique débarrassé de la pesanteur corporelle... (44)

  • La vitesse mentale a valeur en soi, pour le plaisir qu'elle procure à quiconque est sensible à ce plaisir, non pour les avantages pratiques qu'elle peut offrir. (81)

  • ..si l'économie du temps est une bonne chose, c'est que plus nous gagnons du temps, plus il nous sera donné d'en perdre. (82)

  • Il n'y aurait certainement jamais eu de littérature, si une partie de l'humanité n'avait été fortement encline à pratiquer l'introversion, à refuser le monde tel qu'il est, à oublier la fuite des heures et des jours pour garder les yeux fixés sur l'immobilité des paroles muettes. (90)

  • Le langage me paraît toujours employé de manière approximative, fortuite, négligente, et la gêne qui en résulte est à mon sens insupportable. Qu'on n'aille pas croire, de ma part, à une réaction d'intolérance envers le prochain. C'est en m'entendant parlé moi-même que je me sens le plus gêne. (98)

  • ...Toute partie s'achevait sur un gain ou sur une perte: mais de quoi ? Quel était le véritable enjeu? (Dans "Les villes invisibles" de I.Calvino) (119)

  • ...les langues naturelles disent toujours quelque chose de plus que les langages formalisés, et qu'en elles une certaine quantité de bruit trouble toujours l'essentiel de l'information;... (121)

  • Comme disait Hofmannsthal: « La profondeur doit se cacher. Où cela ? A la surface.» (124)

  • Selon moi, nous sommes toujours à l'affût d'une chose cachée, ou simplement potentielle ou hypothétique, dont nous suivons à la trace l'affleurement à la surface du sol. Je crois que nos mécanismes mentaux élémentaires se répètent à travers toutes les cultures de l'histoire humaine, depuis que nos ancêtres du Paléolithique s'adonnaient à la chasse et à la cueillette. La parole relie la trace visible à la chose invisible, à la chose absente, à la chose désirée ou redoutée, comme une fragile passerelle jetée sur le vide.
    Aussi le juste emploi du langage, selon moi, est-il celui qui permet de s'approcher des choses (présentes ou absentes) avec discrétion, attention et prudence, en respectant ce que les choses (présentes ou absentes) communiquent sans le secours des mots. (124/125)

  • C'est parce que je m'efforce de sortir d'une connaissance anthropomorphe que la science éveille mon intérêt; mais je suis convaincu , en même temps, que mon imagination ne peut être qu'anthropomorphe; d'ou mon pari de représenter anthropomorphiquement un univers où l'homme n'a jamais existé, et où il semble même très improbable qu'il puisse exister un jour. (147)

  • Aujourd'hui, nous sommes exposés à un tel bombardement d'images que nous n'arrivons plus à distinguer l'expérience directe de ce que nous avons vu pendant quelques secondes à la télévision. (149)

    (Editions de Seuil 2001. Collection Point. Traduit de l'Italien par Yves Hersant)



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